S’insérer dans le socio-professionnel

Cette fois ça y est, c’est vraiment terminé. Le voyage au cœur du Royaume de la Thèse touche à sa fin et il est grand temps d’aborder la question qui t’a été posée pendant toutes ces longues années : « et tu vas faire quoi après ta thèse ? ». Bien sûr, tu t’es amusé.e à répondre ceci : « Rien, mais littéralement rien. Ne-rien-foutre toute la sainte journée, nada, niks, niet, pet-de-lapin. La glande intégrale pendant 4 mois minimum ». Mais on sait bien toi et moi que tu n’en penses pas un traître mot et que ton petit cerveau hyper-actif ne va pas attendre une seule seconde avant de se mettre en branle pour se chercher une occupation. Alors cette semaine, et pour ce dernier billet de l’année 2018, What-Sup s’intéresse à la fin de thèse et à l’après-thèse.

 

La presque fin : la soutenance de thèse

Tu ne penses quand même pas que tu allais être lâché·e dans la vraie vie comme ça sans passer par l’épreuve de feu ? La soutenance de thèse, c’est ce moment de plusieurs heures (pour les moins chanceux) où tu dois prouver que tu n’as pas passé ces longues années uniquement à regarder Kaamelott. La soutenance publique est généralement précédée, à quelques jours ou semaines près, suivant les universités et les domaines, d’une soutenance privée, uniquement en présence de ton jury. Cela permet à ce dernier de t’en envoyer plein la face sans devoir tellement s’en préoccuper pouvoir faire ses commentaires en toute transparence avant l’épreuve publique, où se réunissent généralement la famille et les amis de l’impétrant·e (= le ou la candidat·e au diplôme). Pas la toute bonne ambiance donc en cas de commentaires désagréables faits en public (#believeme #jeteraconteraiuneautrefois).

La bonne nouvelle c’est que te voilà donc proclamé·e Docteur·e, après une vingtaine de minutes de présentation et une moyenne de 2h de questions-réponses (ça c’est pour la version belge : en France, on est dans un autre level de timing – totalement indécent d’ailleurs soit dit en passant, parce que, franchement, qu’on me dise bien qui reste concentré·e pendant 5h de suite ? Bon.). L’autre bonne nouvelle, c’est le pot de thèse. Surtout quand, comme moi, tu décides que c’est à l’ensemble de tes collègues de s’en charger. Bref, c’est que du bonheur.

 

Quitter le navire : bye bye Academia

Là où c’est un peu moins que du bonheur, c’est quand tu dois prendre tes clics, prendre tes clacs, et remballer, merci bonsoir. L’une des options qui s’offre à toi quand tu finis ta thèse, c’est en effet de quitter le navire et de t’engager dans l’immensité de possibilités qui te sont offertes en dehors du monde académique. Pour cela, il faudra néanmoins être prêt.e à pas mal de sacrifices, et le premier, est de décrocher un poste qui ne correspond pas nécessairement à ton diplôme. Il faut dire que les jeunes docteur·es sont des profils recherchés parce que c’est une force de travail à haute valeur ajoutée à moindre coût (#vocabulairenéolibéral). Il est en effet rare que le diplôme soit valorisé en tant que tel. Dans l’administration publique par exemple (prenons l’exemple totalement au hasard du Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles), il n’existe rien au dessus du niveau 1, qui correspond à un niveau Master. Il y a moyen de faire reconnaître la thèse comme étant une expérience professionnelle (qui est franchement super), mais le diplôme en tant que tel n’est pas valorisé, et ne le sera sans doute jamais.

Mais hauts les cœurs ! Comme précisé dans le premier billet du blog (#élipsetemporelle), faire une thèse c’est avant tout acquérir un tas de connaissances qu’il s’agit de pouvoir habilement mettre en avant auprès d’un service, d’une entreprise ou auprès de soi-même si l’aventure du travail indépendant te tente. Le seul conseil que je pourrais donner ici est le suivant (même si je vois bien que tu n’as rien demandé) : réfléchis bien. Il est indispensable de prendre le temps après la soutenance pour se poser, réfléchir, évaluer les possibilités, et voir ce que tu retires de ton doctorat. Certaines personnes ont tendance à être assez catégoriques : « PLUS jamais de recherche, je veux un job où je rentre à 17h chez moi, je mets mes savates et je termine la saison 2 de 13 Reasons why en une soirée » ! Mais quand on ne prend pas le temps de prendre du recul, le risque est de foncer droit dans le panneau d’un job qui ne convient pas.

Les questions à se poser son multiples : Quelle est ma priorité d’un point de vue professionnel ? Quelle importance je donne au travail ? Suis-je sûr·e de vouloir quitter le monde académique ? Quelles compétences, au service de qui ? (et accessoirement, est-ce que ca va me permettre de payer le toit au dessus de ma tête et mes nombreux plats préparés Picard ?)

 

S’accrocher au navire : Poursuit of happiness

Après la thèse, il t’est aussi tout à fait loisible de décider se persévérer afin d’atteindre le graal du graal : un poste permanent d’enseignant·e et/ou chercheur·e dans une université, en passant par les cases “post-doc”. Cela signifie que, quand en prenant le recul nécessaire après la thèse évoqué supra, si c’est « la stabilité » qui apparaissait comme étant ta priorité professionnelle, je te conseille fortement de passer ton chemin. Décrocher un poste universitaire n’est pas une promenade de santé, et dépend de facteurs souvent externes aux candidat·es. Comme partout, il y a des jeux de chaise musicale ou de placements de pions. Un chercheur qui est un génie dans son domaine mais qui n’est pas parvenu à se construire un réseau puis à mobiliser celui-ci au fil de sa carrière scientifique aura sans doute un peu moins de chance de décrocher un poste permanent. Au contraire, une chercheuse hyper-active dans le réseautage institutionnel et ultra-impliquée partout sera sans doute plus rapidement informée des possibilités de financement et saura peut-être toucher les bonnes personnes pour avoir des échos permettant d’optimiser sa candidature à un financement ou à un poste.

Je peux difficilement taire dans ce contexte ce qu’on peut clairement appeler une injonction à la mobilité internationale, dans le cadre de la carrière scientifique. L’ARES (Académie de Recherche et d’Enseignement Supérieur) a d’ailleurs récemment consacré l’un de ses Midis à cette question et à l’impact sur la carrière des chercheurs et chercheuses. Bien que la Secrétaire Générale du FNRS, Véronique Halloin, avance que la mobilité n’est pas une obligation et qu’il est possible d’obtenir un mandat de chercheur qualifié (poste permanent) sans avoir eu d’expérience significative de recherche à l’étranger (+ de 3 mois), la pression de l’international est bien réelle dans le vécu des chercheurs et chercheurs en FWB. La mobilité est pourtant parfois un non-sens. Comme soulevé au Midi de l’ARES du 7 juin 2018, tous les domaines ne sont pas concernés : on l’envoie où le juriste spécialiste du droit pénal belge par exemple ? ou l’historienne qui travaille sur l’histoire namuroise sur base d’archives locales ? Par ailleurs, il est possible de retrouver ce que la mobilité peut offrir sans pour autant devoir se manger des milliers de kilomètres : la découverte de nouvelles méthodes, la rencontre d’autres nationalités, l’apprentissage de nouvelles langues, il n’est pas toujours nécessaire d’aller très loin pour retrouver tout ça. L’exemple de laboratoires étrangers où se retrouve tout un groupe de chercheurs post-doc issus du même pays, parlant la même langue et appliquant les mêmes méthodes a été évoqué : à quoi bon ?

 

Il y a beaucoup à dire sur l’insertion professionnelle des docteur·es et sur la carrière de ceux-ci. Et il y aura encore plus à dire quand l’Observatoire de la Recherche et des Carrière Scientifique livrera les résultats de la grande enquête lancée la semaine dernière et précisément consacrée à … l’insertion socio-professionnelle des docteur·es en FWB ! Stay tuned, What-Sup t’en parle tout bientôt !

Ce billet est le dernier d’une série consacrée au voyage dans le merveilleux pays de la thèse ! Voici les liens des billets précédents : 

Bonne lecture ! 

La fin du Grand Voyage (V) : Soutenance et après-thèse
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